Conditions de résiliation du commodat non porté à la connaissance de la SCI

J ai un commodat signé devant un notaire sur un bien immobilier que j occupé depuis 5 ans et pour un délai de 30 ans. Le bien immobilier est représenté par une sci dont la composition est familiale : 10% pour chaque associé, mon beau fils et ma fille et 80% le père de ma fille avec lequel je suis divorcée. Les deux associés m ont envoyé une assignation pour casser le commodat afin de m expulser de mon domicile et vendre le bien. Ils estiment qu ils n ont pas été mis au courant par le gérant pour faire le commodat. Que dois je faire ?

Question posée le : 12/04/2021

Chère Madame,

Vous avez conclu, avec votre ex-mari, un contrat de commodat vous permettant d’occuper pour une durée de 30 ans, un bien appartenant à la SCI dont votre ex-mari est le gérant. Ses associés - votre fille et votre gendre -, estimant ne pas avoir été tenu au courant du contrat de commodat, vous assignent afin que vous quittiez le bien puisqu'ils projettent de le vendre.

I/ Sur la validité du contrat de commodat

Sur la validité du contrat de commodat, deux points sont particulièrement important : l’authentification de l’acte par un notaire et le consentement des parties.

A/ L’authentification de l’acte par un notaire

Le contrat de commodat est un contrat de prêt à usage gratuit, permettant à une personne, appelée le « commodant » de concéder à une autre personne, appelée le « commoditaire », une chose gratuitement et sur une certaine durée, à charge pour le commoditaire de restituer la chose en l’état au terme du contrat.

Le contrat de commodat, pour être valide et non remis en cause par l’administration fiscale, doit absolument avoir été évalué et authentifié par un notaire.

En l’espèce, il semblerait que votre contrat de commodat soit, sur ce point, valable dès lors que vous avez bien signé votre contrat de commodat avec votre ex-mari par la présence d’un notaire, il y a 5 ans, et ce pour une durée de 30 ans.

B/ Le consentement des parties

En vertu de l’article 1128 du Code civil, sont nécessaires à la validité d’un contrat : -Le consentement des parties, -Leur capacité à contracter, -Un contenu licite et certain.

Le consentement des parties est important dans votre cas car votre fille et votre gendre n’ont pas, selon eux, consenti au contrat de commodat.

En droit, il est constant et non contesté que le contrat qui a été consenti par le gérant d’une SCI sans l’autorisation préalable des associés de ce dernier n’a pas été consenti par eux (v. C. Com., 23 octobre 2019, Aff. C-18-11.425).

Pour les contrats conclus par une SCI comme pour tout autre type de contrats, l’absence de consentement d’au moins l’une des parties signifie que le contrat est entaché de nullité.

En droit, en vertu de l’article 1130 du Code civil, la personne dont le consentement est vicié dispose d’un délai de 5 ans pour demander la nullité d’un contrat.

La question qui se pose ici est de savoir si les associés de la SCI ignoraient réellement jusqu’alors votre contrat de commodat. En effet, si malgré ce qu’ils avancent, ils étaient au courant de ce contrat depuis une durée égale ou supérieure à 5 ans et que vous pouvez prouver cela, alors le contrat ne pourrait être entaché de nullité.

Si ce n’est pas le cas, il se peut que le contrat de commodat soit entaché de nullité et soit annulé par le juge. Si tel est le cas, la responsabilité du gérant de la SCI, votre ex-mari, pourrait être engagée et, à ce titre, il se pourrait qu’il soit tenu de vous verser des dommages et intérêts.

II/ Sur la possibilité d’engager la responsabilité du gérant de la SCI

En droit, en vertu de l’article 1850 du Code civil, chaque gérant est responsable individuellement envers la société et envers les tiers, soit des infractions aux lois et règlements, soit de la violation des statuts, soit des fautes commises dans sa gestion.

Un gérant de SCI peut voir sa responsabilité engagée s’il ne respecte pas le contenu des statuts de la SCI. Bien que nous n’ayons pas accès aux statuts de la SCI en l’espèce, il est constant que la responsabilité d’un gérant de SCI peut être engagée lorsqu’il conclu un acte qui nécessitait l’accord de l’ensemble des associés de la SCI.

Si la responsabilité de votre ex-mari est engagé, à l’appréciation des juges, des dommages et intérêts pourraient vous être octroyées. Faites vous accompagner d’un avocat pour défendre aux mieux vos intérêts.

Un dernier point doit être évoqué, celui de l’obligation alimentaire. En effet, selon vos ressources, ce pourrait être un élément qui joue en votre faveur.

III/ L’obligation alimentaire des enfants et beaux-enfants

En droit, les enfants ont l'obligation d’aider un parent qui n'est pas en mesure d'assurer sa subsistance. Cette obligation, dite d’obligation alimentaire, se traduit par une aide financière ou en nature, qui varie en fonction des ressources et charges de l’enfant et du parent.

En effet, en droit, les descendants ont l'obligation d'aider leurs père et mère ou autres ascendants dans le besoin. Mais aussi, les gendres et belles-filles doivent également aider leurs beaux-parents dans le besoin. C’est ce qui est communément appelé le versement d'aliments. Cette obligation prend fin en cas de divorce ou de décès du conjoint. Néanmoins, l’enfant peut être dispensé par le juge de cette obligation si le parent a gravement manqué à ses obligations envers lui (maltraitance, abandon…).

Le parent qui réclame l’obligation alimentaire doit être dans le besoin, c'est-à-dire dans l’impossibilité de pourvoir seul à sa subsistance (nourriture, vêtements, logement, santé…). Mais aussi, l’enfant doit avoir des ressources suffisantes.

Fondements : Article 205 du Code civil : « Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ». Article 206 du Code civil : « Les gendres et belles-filles doivent également, et dans les mêmes circonstances, des aliments à leur beau-père et belle-mère, mais cette obligation cesse lorsque celui des époux qui produisait l'affinité et les enfants issus de son union avec l'autre époux sont décédés ».


En résumé :

Si vous pouvez prouver que votre fille et votre gendre avaient connaissance de votre contrat de commodat depuis l’origine, votre contrat pourrait ne pas être annulé. Si vous ne le pouvez pas, il se peut qu’il soit annulé.

La responsabilité contractuelle de votre ex-mari pourrait être engagée. Dans de telles conditions et si le contrat est annulé, il se peut que le juge donne obligation à votre ex-mari de vous faire part de dommages et intérêts.

Selon vos ressources et à l’appréciation du juge, vous pouvez faire jouer l’obligation alimentaire, qui interdirait à votre fille et votre gendre de vous expulser de ce bien si vous n’avez pas les moyens de retrouver un logement ou s’ils ne s’engageaient pas à vous aider à vous reloger.

Nous nous tenons disponibles pour vous accompagner dans vos démarches.

Cordialement,

La Cabinet Hashtag Avocats.

Réponse du: 13/04/2021
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